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Jean-Claude Pomonti : “Quand la loi ne protège plus la liberté de la presse, ce sont toutes les libertés qui sont en cause».
05, May 2021 , 11:17 am        
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ដោយ: ថ្មីៗ
Aujourd’hui en retraite, Jean-Claude Pomonti a été journaliste au service étranger du journal français de référence Le Monde de 1968 à 2005. Jusqu’en 1974, il couvre la guerre du Vietnam avant de revenir en 1991 à Bangkok comme correspondant du Monde pour l’Asie du Sud-Est. Fin connaisseur de la région et en particulier du Cambodge sur lequel il a écrit plusieurs livres, Jean-Claude Pomonti, reste, à 82 ans, passionné par le journalisme de reportage pour lequel, en dépit des mutations induites par l’information digitale, « il y aura toujours de la place ». À l’occasion de la journée internationale de la presse, Ky Soklim s’est entretenu avec ce grand nom de la presse internationale.
 
Ky Soklim – Comment êtes-vous devenu journaliste et quelles ont été les grandes étapes de votre carrière ? 

Jean-Claude Pomonti : J’ai toujours eu envie d’écrire. A l’âge de quatorze ans, j’ai hérité d’une machine mécanique d’occasion, une Olivetti-Lettra 32… Par la suite, j’ai fait Sciences-Po Paris, puis j’ai pu m’inscrire en troisième cycle de recherche, toujours à Sciences-Po. Ensuite, j’ai fait mon Service national, encore obligatoire à l’époque, au Vietnam du Sud. C’est pendant ce séjour, de 1965 à 1967, donc en pleine guerre, que j’ai commencé à bifurquer vers le journalisme. Le Monde m’a intégré en 1968 et j’y suis resté jusqu’à ma retraite, en 2005.
 
Le reportage, qui a été ma vie, n’est pas une carrière. Davantage qu’une envie, c’est une manière de vivre, une passion.  On peut faire carrière dans l’édition, pas dans le reportage. J’ai passé une vingtaine d’années en Afrique et une quarantaine d’années en Asie, où je vis toujours.

Ky Soklim – Parmi les centaines d’articles que vous avez publiés, pouvez-vous nous en citer quelques-uns parmi ceux que vous êtes particulièrement heureux d’avoir écrits ?
 
Jean-Claude Pomonti : Pas facile. Le jugement des autres est peut-être plus sage. Le portrait d’un conseiller militaire américain détaché dans une province du sud-Vietnam m’a valu, en 1973, le Prix Albert-Londres. D’autres articles ont été repris en France comme à l’étranger. J’en suis très fier. Mais, une fois un article publié, je ne le relis jamais. Il ne faut pas se relire. C’est trop souvent décevant. Les heureuses surprises ne sont pas nombreuses. 
 


Ky Soklim – Vous avez-été le correspondant du Monde en Asie du Sud-Est, quels sont les événements qui vous ont le plus marqués ?
 
Jean-Claude Pomonti : L’extraordinaire percée de cette région située entre le monde indien et l’extrême orient, région que j’ai parcourue dans tous les sens pendant un demi-siècle. Quelle vitalité ! On a beau passer une bonne partie de son temps à relater des conflits et des crises, la région pousse de tous les côtés. C’est la région des ‘tigres’, de la modernisation, du développement. Certes, il y a les marches arrière, les errements, la corruption. Le temps des guerres, de son côté, n’est jamais révolu. La Chine de Xi Jiping, dominatrice, exerce des pressions de plus en plus fortes sur ses voisins méridionaux. Mais les progrès sont là, même quand un phénomène comme la pandémie actuelle de Covid19 fait perdre bien du temps.
 
Je voudrais, toutefois, ajouter une parenthèse concernant le Cambodge. Curieusement, mon premier livre (en 1971, en collaboration avec Serge Thion, Cambodge, des courtisans aux partisans, Fayard) a été consacré au Cambodge et le plus récent (en 2017, Cambodge, Maîtres de la terre et de l’eau, Nevitaca), l’est également. Le Cambodge est un pays à la fois attachant et tragique, où j’ai vécu des moments bien pénibles et d’autres d’une grande tendresse. 
 
 Ky Soklim - La presse, un quatrième pouvoir ? Qu’en pensez-vous ? Comment conceviez-vous votre métier et votre rôle dans la société en tant que journaliste ?

Jean-Claude Pomonti : Il y a confusion dans un domaine – la communication – qui se modernise très rapidement. Je me raccroche à l’idée – plus exactement, au fait – qu’il y aura toujours une plage disponible pour un bon reportage. J’en suis convaincu. Le principe commercial selon lequel il faut satisfaire d’abord le public a des limites. La qualité – de l’écrit, de la photo, de la vidéo, du documentaire – saura toujours se faire une place. 
 
Ky Soklim - Certains disent que la presse doit être un partenaire du développement du pays. Qu’en pensez-vous ?


 
Jean-Claude Pomonti : Derrière ce discours se profile la censure. Quand la loi ne protège plus la liberté de la presse, ce sont toutes les libertés qui sont en cause. Bien entendu, la presse est un partenaire évident du développement. A la condition qu’elle puisse elle-même se développer librement.
 
Ky Soklim - Dans certains pays, on dit qu’il faut certes dire la vérité, mais aussi que toute vérité ne doit pas être dite dans certaines conditions. Mais lorsque j’ai étudié à l’école de journalisme avec des professeurs occidentaux, on nous disait qu’il faut dire la vérité même si cela coûte et surtout si cela coûte. Qu’en pensez-vous?
 
Jean-Claude Pomonti : Le rôle du journaliste est d’informer, de rapporter ce qui se trame. Il ne devrait pas y avoir de ministère de l’information. L’information n’est pas dans le domaine des gouvernements. La liberté d’informer doit être acquise, légale.
 
 Ky Soklim - L’information en ligne, les réseaux sociaux ont modifié radicalement la manière dont est produite et circule l’information ? Un bien ou un mal ?

Jean-Claude Pomonti : Il y a eu l’information avant l’internet et l’information à l’époque de l’internet. J’ai connu les deux époques. Sur le plan pratique, le changement est radical. Mais sur le fond ? Ce qui compte : que la société fait – ou ne fait pas – de fabuleux progrès techniques.  

Ky Soklim – Dans ce nouveau contexte quels conseils donneriez-vous aux jeunes journalistes ?

Jean-Claude Pomonti : Un sujet vous attire, accrochez-vous. Apprenez à faire une belle photo, un bon montage vidéo, à bien tourner une phrase. Donnez-vous les moyens de bien traiter votre sujet. Le reste suivra.

Ky Soklim - Vous avez interviewé à maintes reprises le Premier ministre Hun Sen.  Avez-vous des souvenirs marquants de ces rencontres ?

Jean-Claude Pomonti : J’ai souvent rencontré Hun Sen quand j’étais le correspondant du Monde, c’est-à-dire jusqu’en 2005. Je ne l’ai pas revu depuis. Pour moi, le tournant du régime s’est amorcé en 1998, à la suite de la première victoire électorale du PPC. Depuis, le régime est devenu progressivement monolithique. Il y a dérapage, ce qui n’est jamais bon pour l’avenir d’un système.
 
 

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